Traversée de Port à Porto Santo (Madère)

Une belle fenêtre météo sur une grande semaine nous annonce un anticyclone important avec des vents du nord de 15 nœuds : c’est le moment ou jamais d’envisager la plus grande traversée de notre voyage.

Une première journée calme

Nous sortons du Douro vers 11h le 6 novembre. La mer est belle, un grand soleil réchauffe l’atmosphère malgré un petit vent du nord de 15 nœuds. Nous partons au grand largue sous génois et GV arrière. Le début de la traversée est très agréable et notre premier repas à bord peut être pris à table : j’en profite pour cuisiner des haricots verts plats avec des tomates. En traversée nous sommes trop souvent réduits au régime sandwich et les légumes se font rares, alors il ne faut négliger aucune opportunité pour s’alimenter plus « diététique ». Le calme est de courte durée : dans l’après-midi le vent forcit à 20 nœuds et la mer se creuse et devient difficile. Nous devons mettre le moteur pour maintenir plus facilement le cap… mais il refuse de démarrer, lui qui part toujours au quart de tour ! Super Titi officie rapidement : il recale la batterie, change la cosse et ça repart !

Des conditions plus musclées

La vie s’organise à nouveau à bord pour assurer les quarts. Thierry, notre super équipier, prend le premier quart de nuit avec un vent qui s’établit à 20-25 nœuds et nous oblige à prendre trois ris dans les voiles : malgré cela le bateau file à 6-7 nœuds ! Le quart du capitaine s’avère encore plus musclé et, à plusieurs reprises, il doit mettre le moteur  pour reprendre le cap après un empannage intempestif, le bateau étant trop dévié par une grosse vague (heureusement la voile d’arrière est « assurée » par des bouts qui l’empêchent de balayer le pont). Notre pilote automatique (Youn pour les intimes) donne des signes de faiblesse en affichant par instants « low batterie » ou « ST7000 » : pourvu qu’il tienne !

Fort heureusement pour moi, le quart du matin est plus calme : le vent tombe à 20 nœuds mais la mer reste forte. Le voilier « Gatsby » (d’après son émetteur AIS) nous rattrape doucement et, durant deux heures, nous restons en route de collision sur l’écran. J’imagine bêtement qu’il va infléchir sa route pour passer derrière nous… mais il s’approche et ne change toujours pas de cap ! Je réveille Thierry qui tente en vain de les contacter à la VHF : tout le monde dort et aucune alarme AIS n’a visiblement été programmée ! Au final on met le moteur et on change de cap pour l’éviter, mais avec 3 mètres de houle la manœuvre est délicate et nous empannons une nouvelle fois. C’est fou qu’en pleine mer, alors qu’on ne voit quasiment aucun bateau durant des jours, on arrive tout de même à se trouver en danger de collision !

La journée suivante est fatigante avec une grosse houle et un vent soutenu. Dormir est difficile car nous sommes secoués comme des pruniers. Après 24 heures nous avons déjà parcouru 110 milles (la moyenne étant de 100) !

Ca se calme un peu

Je permute mes quarts avec notre équipier Thierry : c’est maintenant moi qui assure le premier quart de nuit jusque minuit et lui qui prend la relève de Thierry à 4-5 heures du matin. C’est plus reposant pour moi car je peux ainsi dormir à mes heures habituelles. Pour mon premier quart du soir le vent redescend à 15-20 nœuds : ouf ! La nuit est calme car le vent faiblit à 10-15 nœuds et la houle est moins violente car nous avons passé le plateau continental.

Enfin le beau temps... et le vent tourne !

Au matin du 3ème jour les conditions redeviennent plus agréables, soleil et mer belle : nous allons enfin pouvoir souffler un peu et mieux dormir. Thierry tente de tangoner le génois. Il doit d’abord  réparer le tangon car le point d’accroche est grippé. Peine perdue : même tangoné le génois fasseye. Nous poursuivons donc au moteur… mais la courroie d’alternateur couine et Thierry est obligé d’aller dans la cale moteur pour la retendre.

Après 48 heures de navigation, nous avons fait 200 milles (à vol d’oiseau depuis Porto). Profitant du calme, Thierry nous prépare un riz au thon… j’apprécie ! En début d’après-midi le vent tourne à l’ouest et s’établit à 6-10 nœuds : nous repartons sous voile au près : c’est plus confortable qu’en vent arrière.

Le vent forcit et la houle se creuse

Mon quart du soir démarre calmement, puis le vent tourne Sud-Sud/Est et monte à 15 nœuds tandis que le ciel se couvre de gros nuages. Je réveille le capitaine qui prend deux ris dans la GV arrière et un dans le génois. Lorsqu’il prend la relève, les conditions se durcissent encore, le vent s’établissant à 30 nœuds durant un bon quart d’heure : vitesse record du bateau à 8 nœuds ! Quand notre équipier prend son quart du matin le vent se calme un peu et vire Ouest.

Au matin du 4ème jour de mer, le pilote donne beaucoup de signes de fatigue et, coup de chance, Thierry décèle l’origine du problème : il répare l’alimentation électrique et « Youn » ne nous pose plus de soucis. En 3 jours nous avons parcouru 300 milles… il nous en reste 320. L’après-midi se poursuit au près avec un vent d’ouest de 15-20 nœuds. La houle se creuse sous un ciel nuageux et les conditions de navigation redeviennent plus éprouvantes. Thierry contacte un cargo pour avoir la météo des jours à venir : vent NE de 10 à 25 nœuds, c’est rassurant !

Le calme revient et le vent vire au nord

En fin de journée du 4ème jour, le vent et la mer se calment. Le vent vire au nord et nous retrouvons les joies du largue, avec l’appui du moteur lorsque le vent faiblit trop par moments.

Le cinquième jour est calme. Après une matinée de bruine et quelques grains, le soleil revient. Le vent du Nord-Ouest s’établit à 10-15 nœuds, la mer est assez calme et la navigation paisible : ça fait du bien à tout l’équipage ! Une nouvelle fois je peux cuisiner une ratatouille que nous dégustons à table : c’est réconfortant pour l’équipage.

Le sixième jour est calme et ensoleillé, nous naviguons au grand largue mais devons mettre au moteur quelques heures pour recharger les batteries.

Un accueil sympa à Porto Santo

Au matin du 7ème jour, le 12 novembre, l’ile de Port Santo est en vue ! La fin du trajet est plus délicate car nous devons garder le cap en vent arrière et la houle rend la navigation délicate. Nous arrivons dans le port de Porto Santo en début d’après-midi… et avons la bonne surprise d’être accueillis par l’annexe du bateau MesAnges qui nous attend. Ils ont « trouvé » notre site sur internet et nous ont contactés car ils font le même périple que nous.

Débriefing

Nous avons donc parcouru, en 6 jours (et deux heures), 325 milles pour couvrir les 650 milles qui séparent Porto au Portugal, de Porto Santo à Madère. Notre moyenne journalière s’établit donc encore une fois aux environs de 100 milles. Nous avons tiré un seul bord, tribord amure, au portant le plus souvent ! Bien que la météo annonçait 15 nœuds de vent et un temps calme anticyclonique, nous avons eu plus de vent et une houle désagréable qui ont rendu ces journées fatigantes. Toutefois, pour une traversée à cette période, nous avons eu plutôt de bonnes conditions.

Durant la traversée nous n’avons aperçu des dauphins qu’une seule fois. Comme d’habitude, bien que nous mettions des lignes de traine, aucun poisson ne vient mordre à l’hameçon !

Enfin, le bateau reste maintenant totalement sec : plus d’infiltrations dans la cuisine ni dans la cabine avant !

Fil conducteur

Récit précédant et récit suivant de la saison 3.

Date de dernière mise à jour : 18/11/2016

Commentaires

  • Cath
    • 1. Cath Le 21/11/2016
    dans l'ensemble les prévisions sont relativement fiables, surtout le sens du vent. sa force peut varier en plus ou en moins, mais a priori pas dans des proportions importantes.
    Nous avons traversé un anticyclone qui avait un peu d'avance sur les prévisions, ce qui explique que les vents ne soient pas tels que prévus à l'heure H.
  • malleret b et i
    • 2. malleret b et i Le 19/11/2016
    je vous suivais via AIS, mais je vois que les prévisions météo ne sont pas toujours exactes Avez-vous une explication ?
    Le sens du vent est-il celui que vous aviez prévu ?