Traversée Aruba vers RD
Nous quittons enfin Aruba
Nous projetons d'aller sur l'Ila Mona. C'est une île portoricaine entre Porto Rico et la République Dominicaine. Comme c'est une réserve naturelle on espère pouvoir y rester quelques jours sans passer par la case formalités. Nous avons abandonné l'idée d'aller à Porto Rico en raison du prix prohibitif du visa.
Nous attendons une fenêtre météo favorable pour traverser la mer Caraïbe. Le vent souffle à 25 noeuds de NE durant une grande semaine. Enfin la météo annonce une bonne accalmie et même un vent virant Est-sud-est. De plus c'est la pleine lune et donc plus agréable pour les quarts de nuit.
Au chantier Thierry a fait une intervention sensible en démontant l'arbre d'hélice pour changer le pallier de roulement dû à notre arbre très long et le presse étoupe qui fait le joint autour de l'hélice. Du coup il a été obligé de réaligner l'arbre et le moteur. En cas de problème ça peut endommager les pièces. Thierry est donc un peu stressé...
Le 2 février au matin nous levons enfin l'ancre. Au moment du départ, Thierry doit intervenir sur le boîtier d'alimentation du traceur (carte GPS à la barre) pour revoir quelques contacts defaillants.
Cela fait neuf mois que nous n'avons pas navigué ! Nous passons faire la clearance de sortie et le temps commence à nous jouer des tours. En pleine manœuvre d'appontage aux douanes nous sommes accueillis par un grain blanc et des rafales à 38 nœuds... juste le temps de s'amarrer sous une pluie battante.
A 10 heures nous sortons du chenal pour remonter au nord de l'île. Le vent est idéal avec 15 noeuds et la mer est belle. Tout s'annonce bien et je ne suis pas stressée outre mesure par cette première longue navigation.
Premières 24 heures
Une fois éloignés d'Aruba le vent forcit et la mer se creuse. Nous prenons le cap plein nord au près serré; impossible d'aller plus à l'est. Nous naviguons sous génois avec un ris lorsque le vent forcit. A cette allure le bateau gîte pas mal et la descente sur la vague met le plat bord sous l'eau. Nous essuyons deux grains blancs. Le vent souffle en rafales jusque près de 40 noeuds, la mer écume et devient blanche sous un ciel tout noir. C'est un beau spectacle... quand on a confiance dans son bateau !
N'étant plus amarinés, le mal de mer nous guette tous les deux... pas au point de rendre notre déjeuner par dessus bord, mais suffisamment pour nous chahuter l'estomac. Ça tombe bien qu'on n'ait pas faim parce qu'aucun de nous ne se sent capable d'aller préparer un repas. Thierry parvient tout de même à nous réchauffer des pâtes, mais impossible pour moi de les avaler. Nous nous nourrissons de fruits secs et de barres de céréales. Les déplacements dans le bateau sont fatigants... nous manquons cruellement d'entraînement !
Comme d'habitude je prends le quart jusque minuit. Les conditions sont correctes. Vers 10h le traceur s'éteint et se rallume à plusieurs reprises. Ensuite c'est le pilote automatique qui sonne avec le message "batteries faibles"... Aïe, aïe, aïe... Je réveille Thierry qui vient à nouveau ouvrir le boîtier électrique d'alimentation de ces deux appareils. Recherche de panne. Il bricole quelques contacts défaillants... et ça remarche... mais pas pour longtemps ! Le pilote recommence à sonner. Second round de dépannage. Cette fois Thierry découvre que la ligne d'alimentation de cet étage du tableau électrique (refait au chantier) est trop faible. Il installe un shunt plus gros directement branché sur une batterie... et ça fonctionne, ouf ! Naviguer sans pilote automatique nous obligerait à barrer non stop et ce serait vraiment très difficile pour nous.
2e jour de mer
La météo reste stable alors que le vent était censé faiblir, voire virer légèrement sud...
Depuis le départ je fais une mauvaise manipulation dans les toilettes. Pour m'éviter d'ouvrir la vanne d'arrivée d'eau de mer, difficile à bien refermer, je me contente d'évacuer dans la cuve d'eau noire... erreur fatale... ça détruit la pompe ! Voilà mon électricien du bord qui se transforme miraculeusement en plombier. Il se bat avec les toilettes une grande heure mais ne parvient pas à réparer. En actionnant la vanne d'admission d'eau, elle lui reste dans les mains. Il démonte la pompe et met une pinoche au bout de tuyau (sécurisée avec un collier bien sûr). Le pauvre ressort de là tout ruisselant de sueur et l'estomac en vrac. Les autres toilettes étant hors d'usage, nous voilà réduits à utiliser le seau. L'exercice est délicat avec la gîte et les vagues qui ballottent le bateau...
3e jour de mer
La journée est belle. Du soleil, vent 15 à 20 noeuds et mer plus calme.
La météo se gâte en fin d'après-midi et durant la nuit le vent s'établit à 20-25 nœuds et la mer se creuse à nouveau. Nous traversons plusieurs grains violents. Dans ces conditions notre mal de mer ne s'améliore pas. Thierry se fait doucher à plusieurs reprises et les pantalons mouillés s'amoncellent dans le carré. La fatigue de ces journées à se faire secouer se fait sentir, amplifiée par le peu d'alimentation. Vivement qu'on arrive... le vent ne s'étant pas orienté plus au sud notre cap nous mène plutôt vers Haïti (à éviter !).Nous serrons le vent au maximum et espérons tout de même atteindre la limite ouest de la République Dominicaine...
Dernier jour de mer
La météo ne s'améliore pas et le ciel reste obstinément gris. Même dans la journée nous gardons nos vestes de quart ! On se croirait en Bretagne... Les heures passent ainsi que les grains... La côte se rapproche mais l'île reste invisible derrière les gros nuages. Notre cap se précise : nous visons la Pointe Salinas à l'est d'une grande baie non loin de la frontière avec Haïti. L'atterrisage de nuit y est faisable sans trop de difficultés et de risque. La nuit tombe et il nous reste encore 40 milles qui nous paraissent interminables.
Thierry préfère utiliser le moteur au minimum avant d'avoir pu régler le problème de l'alignement de l'arbre. Nous attendons donc d'être près de notre but pour mettre en route le moteur.
A 11h du soir nous sommes en approche de notre but à quelques milles de nous. Le stress monte : est-ce que le moteur va fonctionner correctement ? Est-ce que le guindeau aura supporté le voyage et ne nous fera pas faux bond ? Thierry fait chauffer le moteur... qui se fait prier pour démarrer et cale peu après. Oh, noooon ! L'électricien - plombier du bord prend sa casquette de mécano. Diagnostic : panne de gasoil (clin d'oeil à Youenn...). Recharge du tank journalier et ça repart ! Ouf...
Par cette nuit de pleine lune la côte se dessine bien. Thierry a repéré une baie très accessible avec quelques mètres de fond. Au dernier moment le ciel s'obscurcit et le vent forcit de nouveau... comme d'habitude... Nous constatons avec grand plaisir que le sondeur fonctionne enfin, miracle ! Ça peut être utile... Le mouillage est réussi du premier coup. Il est minuit trente. Un sms aux enfants et on se prend tranquillou un rhum arrangé bien mérité pour nous détresser. Le temps de dégager notre couchette de tout ce qui a volé des équipets et nous plongeons dans les bras de Morphée.
C'est où ?
Date de dernière mise à jour : 19/03/2023
Ajouter un commentaire