Coranero, île aux eaux vertes
22 mai
Nous partons de bonne heure de Sarqui pour Carenero. Quelques milles que nous parcourons au moteur ( il faut le faire tourner régulièrement) et sous trinquette. Nous allons mouiller dans une anse très fermée à l'est de l'île. La passe est assez large et les fonds de sable à 6-7 mètres ne présentent pas de danger. Toutefois nous faisons l'approche très très doucement. Le mouillage est d'un calme impressionnant : pas la moindre vaguelette et les palétuviers nous protègent du vent. Nous mettons le taud et pouvons même descendre la capote pour mieux profiter du paysage et de la petite brise rafraîchissante. Cela fait des lustres qu'on n'avait pu se permettre ce luxe. Un pur bonheur ! Nous sommes si bien que nous passons la matinée sur le bateau, juste à profiter du délicieux moment présent. Thierry fait une seconde tentative de préparation du pain... en progrès...
Ce matin le ciel semble enfin dégagé de cette brume de sable qui persiste depuis plusieurs jours et a complètement jauni le bateau.
Nous contournons l'île pour aller nous baigner sur la côte au vent. Une sorte de digue naturelle faite de morceaux de coraux morts casse les vagues et délimite un bassin très calme. La baignade est décevante. Ce mur de pierres grises sans vie m'angoisse.
Nous testons un autre endroit non loin du bateau mais là aussi il n'y a rien à voir, juste du sable et des herbiers même pas fréquentées par des tortues. Ce n'est pas sur cette île qu'on se régalera de fonds somptueux...
Dans l'après-midi nous partons en annexe découvrir cette longue île très étroite, une vingtaine de mètres dans son extrémité. La côte au vent est rocheuse et balayée par les vagues. La large baie de la côte sous le vent est d'un calme incroyable ! Pas une vague. La mer est très peu profonde, de quelques dizaines de centimètres à peut-être deux mètres au mieux, et les fonds de sable, par endroits couverts d'algues vertes, donnent des couleurs incroyables : du vert d'eau au bleu profond en passant par toutes les nuances de turquoise. Ajoutez à cela le bleu du ciel qui vire parfois au mauve à l'horizon et le vert vif des palétuviers et c'est un vrai régal pour les yeux ! Les inuits disposent de cinquante mots pour qualifier les nuances de blanc, mais je n'en connais que trop peu pour décrire cette formidable palette de bleus... malheureusement les photos ne parviennent pas non plus à restituer cette richesse de nuances. Comme partout sur ces îles les pélicans et les mouettes sont les maîtres des lieux. L'île n'est pas déserte : trois baraques en piteux état et quelques barques le long de la plage laissent supposer que quelques personnes vivent là, au moins temporairement. Nous accostons au bout de l'île et le contraste entre ces deux côtes si proches est vraiment impressionnant.
Devinez ce qu'on mange ce soir... du poisson ! Nous savourons le calme absolu de notre mouillage. C'est décidé, nous restons ici demain pour en profiter encore un peu.
VIDEO : Panorama du mouillage
23 mai
Alors que nous goûtons cette tranquillité exceptionnelle, un yacht vient s'ancrer ce matin juste à côté de nous ! Thierry, à poil dans l'annexe occupé à améliorer son amarrage, se précipite sur son maillot de bain. Nous entonons une reprise de la célèbre chanson de Renaud : "j'étais tranquille, j'étais peinard, le type est entré dans la baie et m'a dit : t'as une annexe mon pote, elle me botte"... Et bien évidemment le yacht fait tourner son groupe électrogène ! Pas un bateau à des milles à la ronde et on doit se coltiner celui-la.
Depuis que nos annexes se sont fait la malle à Ste-Anne, Thierry attache systématiquement l'annexe avec deux amarres car sur ces îles il ne serait pas forcément possible de la retrouver. Thierry améliore le système pour avoir un second cordage à poste rapide à amarrer. Notre annexe tient ses promesses. Elle est parfaite pour aller explorer les îles sans risque et l'échelle de bain me permet d'avoir accès aux splendeurs sous-marines.
Nous partons ce matin sur l'autre côté de l'îlot qui ferme la baie. Au premier abord nous sommes un peu déçus... mais de tels fonds auraient fait notre délice en Martinique... blasés déjà ou trop exigeants ? Ici le fond de sable est parsemé de coraux "bois de cerf" où les petits poissons pullulent. Ici et là quelques patates de corail " cerveaux " abritent les plus gros. Quelques gorgones agrémentent le paysage. Thierry revient avec un énorme pagre dents de chien de trois kilos ! Il a bien progressé en chasse sous-marine. Je dois maintenant calmer ses ardeurs car le frigo est plein. Tandis qu'il prépare le poisson sur le pont arrière les mouettes affluent en attente des restes. Pas farouches, elles se posent très près et jacassent tant et plus. Thierry voulait être discret, c'est raté.
Notre dernière baignade à Los Roques est décevante. Nous accostons sur une plage et nous mettons à l'eau, mais nous ne voyons que du sable et des herbiers. Ah si, quelques grosses étoiles de mer égayent la blancheur du sable. Il n'y a que très peu de fond. Nous en profitons pour nettoyer la coque de l'annexe qui est déjà pleine d'algues.
Nous préparons le bateau pour la navigation de demain vers les Aves à 35 milles d'ici. Nous devons partir tôt pour arriver de jour. Thierry sort l'annexe et l'attache sur le pont.
Voilà, c'est notre dernière soirée aux Roques où nous venons de passer 22 jours magnifiques.
24 mai
Faux départ ! A cinq heures le réveil sonne mais il fait encore nuit. On entend le vent qui a forci. Un instant après l'alarme de surveillance du mouillage retentit. Pas de panique, le vent est passé quasi sud et le bateau s'est déplacé, mais l'ancre n'a pas dérapé. Une petite houle rentre dans la baie peu protégée des vents de sud. Lorsque le jour se lève le ciel est bien noir, le vent souffle à vingt noeuds. Mauvais temps... De plus Thierry a très peu dormi. A mon grand soulagement son intuition lui dicte de ne pas prendre la mer. Prudence. Décidément Los Roques s'ingénie à nous retenir !
Lorsque nous sortons du lit pour de bon le vent est revenu à l'est et notre baie a retrouvé son calme. Le ciel se dégage peu à peu. Le yacht est parti ce matin et nous retrouvons notre havre de paix, même avec le vent qui monte dans la journée à vingt noeuds à l'abri.
Thierry profite de cette journée pour fignoler l'annexe et pour aller gratter la coque. En quelques jours ici les algues ont bien poussé !
C'est où ? Cherchez à l'ouest...
Fil conducteur
Date de dernière mise à jour : 11/06/2022
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